L’Angola, terre de tourisme mémoriel pour les Américains d’ascendance angolaise

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L’Angola a adopté une stratégie de développement touristique et économique qui consiste à cibler la diaspora angolaise à travers les Amériques, du Brésil à Cuba en passant par les États-Unis. Elle représenterait dans ce dernier pays, au moins 12 millions de personnes, un potentiel énorme lié à une identité et à un héritage communs.

Pendant des siècles, des millions d’Angolais ont été réduits en esclavage et arrachés à leur terre pour être embarqués sur des navires à destination des Amériques. Étudier leurs traces, c’est la mission que s’est donné Afonso Vita, titulaire d’un doctorat en géographie humaine de l’Université de Coimbra au Portugal. Nous le rencontrons à Lisbonne, jadis ville de transit pour de nombreux esclaves originaires d’Angola.

“L’Angola fait partie des pays africains qui ont perdu le plus d’hommes, de femmes et d’enfants à l’époque de la traite des esclaves,” explique-t-il. “Il y a de nombreux lieux où l’on trouve encore des traces de ce commerce transatlantique,” fait-il remarquer.

Les esclaves africains “ont construit l’Europe, l’Amérique et même l’Asie”

Cette traite humaine a prospéré en Angola et au Portugal. Afonso Vita suit le chemin emprunté par les esclaves à l’époque. Aujourd’hui, des plaques au coin des rues sont là pour le signaler. Nous nous rendons avec le chercheur sur une place qui autrefois, servait de pilori ou pelourinho. “Les Pelourinho étaient des espaces où les esclaves étaient placés à l’époque de l’esclavage, où ils étaient maltraités et vendus et ceux qui se comportaient mal étaient punis, sous les yeux des colons,” précise-t-il.

Des pays dans le monde entier ont bénéficié de cette main-d’œuvre. “Les Africains ont construit l’Europe, l’Amérique et même l’Asie et ils ont contribué à des changements dont on voit encore l’influence de nos jours, au niveau mondial,” indique Afonso Vita.

Visite présidentielle angolaise aux États-Unis

Aujourd’hui, cette dimension internationale suscite un travail de mémoire et encourage le tourisme comme au Musée national d’histoire et de culture afro-américaines à Washington. Un lieu visité par le président angolais João Lourenço l’an dernier, lors de son voyage aux États-Unis pendant lequel il a invité en Angola, la famille Tucker, une famille de descendants d’esclaves angolais.

Au musée de la capitale américaine, le dirigeant et son épouse ont découvert les espaces d’exposition en compagnie d’une descendante d’esclaves angolais, Mary Elliott, conservatrice pour les questions d’esclavage américain.”Les Afro-Américains ont été réduits en esclavage dans une nation fondée sur la liberté,” indiquait-elle lors de la visite. “Nous avons été en mesure de faire des recherches généalogiques pour retrouver la trace de leurs descendants,” expliquait-elle avant de montrer une photo de son grand-père. “Donc c’est pour moi un honneur de faire cette visite avec vous aujourd’hui parce que vous et moi, nous sommes liés,” indiquait-elle au couple présidentiel.

Le fleuve Kwanza, route maritime pour la traite des esclaves

Un lien qui remonte à Massangano, une ville au bord du fleuve Kwanza. “Le fleuve Kwanza était l’axe principal de l’expansion coloniale portugaise vers l’intérieur des terres, mais aussi de l’évacuation de cette main-d’œuvre qu’étaient les esclaves,” nous précise Emmanuel Caboco, directeur adjoint de l’Institut National du Patrimoine culturel angolais (INPC). “On estime que plus de 6 millions de personnes ont été évacuéesvers différentes régions du monde,” déclare-t-il.

C’est pour cela que l’Angola souhaite que le corridor de Kwanza figure sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Ce qui lui permettrait d’être éligible aux financements des Nations Unies.

À l’UNESCO, à Paris, un ancien officiel affirme que l’inscription du corridor de Kwanza contribuerait à restaurer la mémoire et les liens culturels. “Relier l’Afrique aux peuples de l’autre hémisphère signifie faire le lien entre les cultures,” souligne Doudou Diéne, ancien directeur de la Division du dialogue interculturel à l’UNESCO. “Le système colonial était un système puissant, non pas de domination politique, mais d’effacement de la mémoire, de la culture et de l’identité,” renchérit-il. “Donc la mémoire, la culture et l’identité doivent aujourd’hui, faire partie de la construction des nations de tous les pays africains,” assure-t-il.

Un festival biannuel en Angola

L’une des manières d’y parvenir en Angola, c’est l’organisation d’événements comme un festival. “Cela passe par le Festival biannuel de rencontre et de retrouvailles de l’africanité en Angola qui durera 2 jours,” nous précise Afonso Vita. “Il comportera des visites, ainsi qu’une table ronde sur différentes questions en lien avec l’esclavage,” dit-il.

Combiner la mémoire et la célébration, une manière de nous souvenir de la tragédie de l’esclavage, mais aussi de l’apport durable de millions d’Africains au reste du monde.

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