“Salut les filles ! Après plus de 10 ans à rêver je m’en vais enfin à Stockholm. Je voulais vous remercier parce que sans ce groupe je sais pas si j’aurais pu sauter le pas.” Ce message, c’est une certaine Mélanie qui l’a posté cette mi-août sur le groupe Facebook “Voyager au féminin en sac à dos”. L’interface, qui regroupe 90 500 abonnées, voit passer des dizaines de déclics chaque jour pour le voyage en solitaire féminin. Dans la même veine, le groupe “We are backpackeuses !” produit des échanges riches entre ses 11 000 membres. Une tendance de fond dans la société qui fait réfléchir de plus en plus de femmes.
“Quand j’ai lancé mon blog de voyage en solo il y a 10 ans, mon audience était très progressive, raconte Jenny Diab, voyageuse et influenceuse. Puis quand les réseaux sociaux sont arrivés, ça a pris une nouvelle ampleur. J’ai créé le groupe Facebook en 2016 et les demandes ont explosé.”
Dernièrement, les profils des internautes ont quelque peu évolué. “On commence à avoir tous les âges”, détaille Jenny Diab, au même moment en voyage solo aux Pays-Bas. “De plus en plus de femmes retraitées s’y mettent et aussi des débutantes. Les réseaux sociaux aident à se rassurer et à échanger ses expériences”.
Les femmes voyagent davantage en solo que les hommes
Et elle n’est pas la seule à observer la tendance. Le voyagiste TUI, premier dans le paysage touristique français, ont très tôt créé une formule pour les personnes solo pour découvrir un pays en petits groupes. “Les femmes sont particulièrement attirées par cette formule ainsi que par les chambres double à partager avec d’autres femmes solo”, détaille le voyagiste à notre journal. “La formule circuits n’est pas nouvelle, elle date de 1965 chez Nouvelles Frontières. En revanche, on remarque une demande croissante des solos et surtout des femmes depuis 6 ou 7 ans.”
Un constat corroboré par la dernière étude de la société “Hitwise” au Royaume-Uni qui relevait que 55 % des recherches de voyage en solitaire étaient faites par des femmes, précisément âgées entre 25 et 34 ans. “Les femmes voyagent plus en solo que les hommes”, confirme Derek Boixière, la co-fondatrice de “La voyageuse” sur son site, qui propose justement de mettre en relation les voyageuses solo avec une hébergeuse locale prête à l’accueillir gratuitement.
L’Organisation Mondiale du Tourisme indique que le nombre de femmes à voyager en solo est passé de 54 millions en 2014 à 138 millions en 2017.
Pourquoi partir seule ?
Pour Hanne, Danoise de 35 ans qui vient de boucler le GR20 en Corse en solo et n’en est pas à sa première expérience de ce type, “le voyage en solo permet de méditer et de se retrouver”. Elle poursuit : “J’ai l’impression de rencontrer des nouvelles personnes plus en profondeur quand je suis seule, je me sens plus ouverte aux autres.”
Le site “Copines de voyage” rappelle que c’est aussi “une véritable forme d’émancipation”. “J’avais envie de partir seule pour sortir de ma zone de confort, parce que j’ai l’habitude d’être très entourée et je voulais voir ce dont j’étais capable, raconte Delphine, une Grenobloise partie pour la première fois en solo e Thaïlande en 2016. Cela m’a apporté un boost de confiance en moià un moment où j’en avait besoin. Cela m’a aussi rendue sereine de me rendre compte qu’il était tout à fait possible de passer de bons moments seul.”
Enfin, pour les esprits les plus indépendants, partir en vacances en solo, c’est un affranchissement, un voyage sans contrainte : vous allez pouvoir organiser votre programme selon vos propres envies. “Il n’y a pas besoin de se coordonner et ajuster ses envies, ce qui peut être difficile et stressant parfois”, se réjouit Hanne.
Encore des freins
Mais de nombreux freins existent encore. En 2020, l’agence de voyage “Tourlane” et l’Ifop ont ainsi découvert que 78 % des femmes n’ont jamais voyagé seules en dehors de l’Europe ou que pour 44% d’entre elles, tenter l’aventure pourrait être freiné par la peur se sentir seules.
Ainsi, l’anxiété d’être seule (44 %) et la sécurité (32 %) sont les principaux freins à un voyage en solo selon les femmes interrogées. Mais on peut aussi prendre le pourcentage en sens inverse : près d’un quart des femmes des femmes interrogées ont déjà voyagé en solo malgré ces deux freins principaux.
“Je reçois beaucoup de messages et de questions, et la plupart du temps, il y a de l’appréhension sur le choix de la destination pour savoir si celle-ci est safe”, explique la blogueuse Jenny Diab. Ensuite, la barrière de la langue freine souvent les femmes qui se demandent si elles vont réussir à communiquer. Enfin, elles appréhendent souvent la solitude, le fait de se remettre en question, sans compter le regard des autres.” Une angoisse que Jenny ne connaît pas : “Même en France, je n’ai aucun problème à aller au cinéma ou au restaurant toute seule”, glisse-t-elle.
Quels conseils ?
Pour le site “Copines de voyage”, qui met en relation des voyageuses solo, mais qui encourage également à partir seule : “Il y a trois questions que vous devez vous poser : est-ce que j’aimerais voyager ? Est-ce que je me suis déjà privée de faire quelque chose ou d’aller quelque part pour faire plaisir aux personnes qui sont parties en vacances avec moi ? Est-ce que j’ai des regrets concernant mes précédents voyages ou sur un voyage que j’aurais aimé faire ? Si l’une des réponses à ces trois questions est oui, alors dites-vous que vous êtes prête à voyager seule !”
Sur son blog, Jenny Diab se veut rassurante : “Lors des premières heures, ça peut être un peu la panique. On se retrouve loin de chez soi, on a du mal avec la solitude et la barrière de la langue peut devenir difficile. Il faut apprendre à se contrôler et à se rappeler pourquoi on a décidé de s’engager dans ce voyage en solo. Il suffit de poser son esprit dans un endroit où on se sent à l’aise pour réfléchir à ce qu’on va faire. Par exemple, prendre une chambre seule peut vous aider à y voir plus clair. Le fait de ne pas être oppressé dans un dortoir, avoir du calme, dormir sereinement va aider à apaiser cette panique.”
Depuis 5 ans, la blogueuse, qui prépare actuellement une traversée des Vosges à pied, a également créé des voyages en petits groupes pour découvrir la Laponie l’hiver, “un vrai tremplin vers le voyage solo”. Dans un podcast quelle a lancé il y a 2 ans, Jenny Diab distille les astuces, comme son premier épisode “Conseils pour voyager seuls à travers le monde”. D’autres podcasts, comme “Bourlinguez” et particulièrement son premier épisode sur le voyage en solo d’une femme en Écosse peuvent être des sources d’inspiration. Mesdames, à vos sacs à dos…