À l’instar de Hong Kong et Singapour, plusieurs territoires concluent des accords bilatéraux pour permettre à leurs citoyens de se déplacer sans restriction. Ces corridors sanitaires annoncent-ils la reprise des voyages ?
Voyager sans aucune restriction d’un pays à l’autre : rien qu’une simple habitude il y a un peu plus d’un an. Aujourd’hui, une exception réservée à quelques pays privilégiés. Dernier exemple en date ? Hong Kong et Singapour ont annoncé ce lundi 26 avril leur intention de lancer à compter du 26 mai une «bulle» aérienne permettant aux voyageurs des deux territoires de ne pas effectuer de quarantaine à l’arrivée. Un vol quotidien, transportant jusqu’à 200 passagers, fera la navette et la fréquence pourrait passer à deux vols par jour à partir du 10 juin.
Permettre aux citoyens de pays se trouvant dans la même situation sanitaire de se déplacer sans contrainte, c’est le principe des «bulles de voyage». La première est créée en mai dernier par les trois États baltes, alors que la plupart des frontières intérieures de l’Europe étaient encore fermées. Les ressortissants d’Estonie, de Lettonie et de Lituanie pouvaient alors circuler librement entre les trois pays sans avoir à se soumettre à la quarantaine obligatoire pour tout visiteur étranger.
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«Nous leur souhaitons la bienvenue à nouveau»
Le 6 avril, c’est la Nouvelle-Zélande qui approuvait le principe d’une «bulle» avec l’Australie. Une mesure effective depuis le 19 avril. Depuis, plusieurs pays ont sauté le pas en 2021, saisissant l’opportunité de relancer une industrie touristique mal en point. D’autant que, bien souvent, ce sont des destinations prisées dont le tourisme occupe une part importante de l’économie. Et dans la plupart d’entre eux, l’épidémie est relativement bien maîtrisée. La Nouvelle-Zélande par exemple, n’a enregistré que 26 décès liés au Covid-19 depuis le début de la pandémie début 2020. Avec moins d’un millier de décès pour une population de 25 millions d’habitants, l’Australie a également été saluée pour sa très bonne gestion.
«Je peux confirmer que les voyages sans quarantaine débuteront dans moins de deux semaines, le 18 avril à 11:59», a annoncé la première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern, adoubée par son homologue australien Scott Morrison. «Nous leur souhaitons la bienvenue à nouveau, de la même façon que les Australiens seront accueillis par les Kiwis», a-t-il réagi. L’Australie avait de son côté ouvert en partie son territoire aux Néo-Zélandais il y a six mois, leur permettant de se rendre dans certains états sans avoir à observer de quarantaine.
Cette bulle – envisagée depuis le début de l’épidémie – devrait donc ouvrir un peu plus d’un an après que l’archipel du Pacifique Sud a fermé ses frontières en raison de la pandémie. «Entre ces deux pays, la bulle de voyage est tout à fait pertinente : il s’agit de deux îles qui ne sont pas centrales dans les flux internationaux», soulignait déjà en janvier Paul Chiambaretto, professeur à Montpellier Business School et spécialiste du transport aérien.
Toujours dans le Pacifique, Taïwan et l’archipel des Palaos ont inauguré leur bulle le 1er avril, avec là aussi l’espoir de soutenir leur industrie touristique durement éprouvée par la pandémie. «Un rayon de soleil» pour le président des Palaos, Surangel Whipps. Le chef d’État a précisé que des experts avaient calculé que le risque de voir le coronavirus atteindre son pays par cette bulle était d’un sur quatre millions.
Des accords difficiles à mettre en place
Mais à l’heure du Covid-19, créer des zones de libre circulation n’est pas chose aisée. L’idée avait tenté le Royaume-Uni et les États-Unis, sans succès. La «bulle» entre Singapour et Hong Kong, prévue dès décembre 2020, avait été reportée sine die en raison d’une nouvelle vague de contaminations dans l’ex-colonie britannique.
Aujourd’hui, cette bulle entre Hong Kong et Singapour dépendra de la manière dont les deux pays, dans les prochains mois, continueront à maintenir bas le nombre de cas de coronavirus sur leur territoire. Les deux villes ont convenu qu’elle sera suspendue deux semaines si la moyenne quotidienne des cas de contamination à l’origine inconnue dépasse le nombre de cinq en une semaine dans l’une ou l’autre.
Ces dernières semaines, plusieurs pays asiatiques ont tenté de conclure un accord avec la Chine pour assurer la reprise du tourisme selon Les Échos , comme la Thaïlande ou la Malaisie. Mais Pékin se montre réticente pour le moment.
Une fois instaurées, ces bulles demeurent fragiles. Elles ne résistent généralement pas à un rebond de l’épidémie, à l’instar de la bulle des États baltes de mai 2020. Elle a fonctionné jusqu’en automne dernier quand la situation sanitaire s’est dégradée dans la région. Aujourd’hui, le dispositif est à l’arrêt.
En Europe, des bulles pour voyageurs vaccinés
Plusieurs pays du Vieux continent ont repris ce genre d’initiatives. À ceci près que les dispositifs prévus en Europe ne concernent que les voyageurs vaccinés. Début avril, l’archipel de Malte, qui cherche comme les Palaos à relancer son industrie touristique (représentant 15% du PIB), a annoncé accueillir les voyageurs britanniques ayant reçu les deux doses du vaccin et ce dès le 1er juin.
Un peu plus tôt, Athènes a mis en place un accord apparenté à une «bulle de voyage». L’accord signé le 8 février entre la Grèce et Israël autorise les citoyens vaccinés contre le Covid-19 de ces deux États à voyager librement l’un vers l’autre. « Israël est une manne très importante pour la Grèce et si 70% de la population israélienne est vaccinée à la fin du mois de mars, il sera plus facile de commencer progressivement à s’ouvrir aux Israéliens », a justifié le premier ministre Kyriakos Mitsotakis. Le 14 février, c’était au tour de Chypre de signer un accord similaire avec l’État hébreu.
La France privilégie, de son côté, la généralisation des certificats sanitaires pour relancer le tourisme. Pour autant, un accord de ce type avec un pays extra-européen n’est pas impossible. C’est «concevable à moyen ou long terme» pour Jean-Pierre Mas, président des Entreprises du voyage. «On pourrait l’envisager avec des pays qui sont dans les grands flux touristiques estivaux, comme la Tunisie ou Israël. Mais cela supposerait probablement que ce soit accepté par toute l’Union européenne, et pour l’instant, il n’y a pas de déclaration du gouvernement en ce sens.»
Daniel Dalton, Président de la Chambre de commerce et d’industrie britannique à Bruxelles, acquiesce. «Nous espérons qu’un tel arrangement pourra être conclu avec la France, qui est non seulement une énorme destination touristique, mais aussi la porte d’entrée vers le reste de l’Europe pour de nombreux voyageurs du Royaume-Uni.» Avant de tempérer : « Cela dépendra des taux d’infection en France et, pour le moment, la situation en France n’est probablement pas assez bonne pour garantir des itinéraires de voyage sûrs.»