UN CHEF D’ŒUVRE NATUREL AUTANT QU’ARTISTIQUE
Le Mont-Saint-Michel ne serait pas ce qu’il est sans la mer. « Il a un effet magnétique sur les visiteurs de par son cadre, de par la majesté des marées et de par les variations de la lumière », explique Sébastien Daligault, naturaliste chez Label Nature et guide dans la baie depuis plus de vingt ans. L’inscription du Mont-Saint-Michel au Patrimoine mondial de l’UNESCO ne se limite d’ailleurs pas à l’abbaye, celle-ci inclut aussi la baie.
Ce cadre naturel a été au cœur d’un projet de génie civil qui aura duré dix ans et permis au Mont-Saint-Michel de redevenir en 2015 une île à part entière. Ces travaux auront vu la digue être détruite et un barrage être construit sur le Couesnon pour en réguler le débit et en exploiter la puissance hydraulique afin d’évacuer le sable vers la mer. Le parking a été déplacé à l’intérieur des terres, à un endroit relié au site par des navettes. La base du Mont s’en est non seulement trouvée embellie, mais cela a également donné lieu à un changement en matière de pratiques touristiques ; les visiteurs sont désormais obligés de rester plus longtemps. L’époque des autocars touristiques qui déposaient des touristes au Mont le temps d’une halte journalière inévitable sur leur grand tour de France est désormais révolue.
Grâce à ces efforts, les grandes marées ont fait leur retour. Celles-ci surviennent environ dix fois par an et encerclent complètement le Mont-Saint-Michel ; un phénomène très apprécié qui ne s’était pas produit depuis 1879.
Ces dernières années, le tourisme s’est davantage déporté sur la baie. « Il y a eu une explosion de la demande pour des traversées de la baie », observe François Saint-James. Les visiteurs se familiarisent avec la faune et la flore de la région tout en marchant dans les pas des pèlerins qui traversaient autrefois la baie à marée basse.
La baie abrite des richesses environnementales aussi merveilleuses que les richesses artistiques de l’abbaye. « C’est l’un des meilleurs endroits pour observer les oiseaux en Europe […], cinquante années d’ornithologie ont permis d’y observer un total de 356 espèces », indique Sébastien Provost, ornithologue et fondateur il y a quatre ans de Birding Mont-Saint-Michel. De même que le Mont, où se retrouvent des touristes du monde entier, la baie est selon lui « un lieu où diverses populations d’oiseaux migrateurs se rencontrent ». C’est par exemple le cas de la bernache cravant, qui quitte la Sibérie en hiver pour venir séjourner dans la baie.
« Le Mont-Saint-Michel, ce n’est pas uniquement l’héritage du bâti ; c’est aussi l’héritage naturel et le paysage », fait observer Thomas Velter.
LE NOUVEAU MILLÉNAIRE DU MONT
Mille ans après le dépôt de sa première pierre, le Mont-Saint-Michel réinvente son image par le tourisme lent et par la mise en avant ses environs. Des événements tels que les représentations théâtrales données au barrage du Couesnon ou les expositions proposées à Avranches attirent les visiteurs dans d’autres lieux associés au Mont et incitent à un séjour prolongé.
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Au Mont-Saint-Michel, l’amélioration de l’expérience visiteur est une priorité. À l’abbaye, une nouvelle entreprise (Keolis) assure une navette qui fonctionne désormais au biocarburant et non au gazoil et dont les temps d’attente seront, dès le printemps, clairement affichés. Il est prévu qu’une équipe d’agents saisonniers accueille les touristes sur le parking et les aide à organiser leur visite.
Puisque la moitié des visiteurs annuels se rendent traditionnellement au Mont-Saint-Michel en juillet et en août, ce nouveau plan touristique repose sur la saisonnalité. Les conditions d’affluence seront communiquées en temps réel, tandis qu’une nouvelle grille tarifaire devrait proposer des prix plus attractifs pour le parking hors saison. Une nouvelle campagne de publicité va de plus voir le jour afin de promouvoir le Mont-Saint-Michel toute l’année.
Mais à vrai dire, l’hiver est peut-être le moment idéal pour s’y rendre. C’est à cette période que l’essence spirituelle de l’endroit ressort le mieux ; on n’y entend alors que les cris des mouettes et le chant des moines pour l’office des Laudes au lever du soleil.