À la recherche du tourisme perdu au Sahara

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À 1 200 km de la capitale Niamey, la citadelle Iférouane est devenue pendant trois jours, au-delà des seuls touaregs, la vitrine touristique de tout un pays menacé sur quasiment chacune de ses frontières par la guerre menée par les jihadistes.

Aux concerts et concours de beauté ont succédé de longues heures à discuter allongés sur des nattes au rythme des verres de thé, un éloge permanent des vertus des pick-up Toyota et surtout un régionalisme à peine caché. « La culture touareg, quoi », sourit le jeune Mohamed Bouhamid, habitant d’Iférouane.

S’il n’y avait pas tant de soldats autour, on pourrait se croire vingt ans en arrière, quand la manne touristique constituait une grande part de l’économie largement informelle de ces contrées désertiques et quand ceux qui sont devenus les chefs des rébellions étaient encore guides touristiques.

Le Niger était, comme le Mali, une destination prisée d’Afrique de l’ouest. Une compagnie aérienne ralliait directement Paris à Agadez, Gao, Kidal… Le Paris-Dakar est longtemps passé par ce désert. Le fantasme de cette époque subsiste, et Niamey veut en profiter malgré les rébellions passées et désormais le jihadisme métastatique qui envahit le Sahel.

À l’oasis d’Iférouane, « tout est sécurisé » selon l’adjoint au maire Hamadi Yahaya appelé l’Honorable

Après l’assassinat de six Français en 2020 à quelques kilomètres de Niamey, la France, autrefois principal pourvoyeur de touristes, a décrété le Niger « zone rouge » et « fortement déconseillée ». À ceux désireux de venir à Iférouane, Paris a intimé de surseoir à ce voyage « des plus hasardeux ».

L’adjoint au maire Hamadi Yahaya peste contre « ces ambassades » qui « ont installé la psychose » alors que le conflit est à plus de 1 000 km d’Iférouane. Le supérieur, « l’Honorable » comme tout un chacun l’appelle, le martèle : « Tout est sécurisé ici. » En plus des soldats par endroits aussi nombreux que les festivaliers, des dizaines d’Ishumar, nom donné aux anciens rebelles, « ont été postés dans le désert alentour », ajoute l’ancien guide devenu chef de la rébellion, Rhissa Ag Boula, aujourd’hui conseiller du président Mohamed Bazoum.

Le méchoui a été servi à Chiriet, porte des dunes du Ténéré, et les guitares électriques ont résonné sur les dunes roses, les deuxièmes plus hautes du Sahara selon la rumeur locale. « C’est comme jouer à la maison », dit le musicien Oumara Moctar dit Bambino : ce désert, c’est « là où nous sommes nés, là où nous avons grandi, ça nous rappelle de là où on vient ».

Le directeur italien de l’agence Société Voyages Sahariens (SAS), Rocco Rava, revient dans ces dunes pour la première fois en quinze ans. Il a grandi à Agadez, capitale régionale, et y a développé son activité touristique avant de se déporter sur le Tchad voisin quand les « turbulences » se sont emparées du Niger.

« Il y a une forte demande », dit-il en expliquant être venu étudier l’opportunité d’y ramener des touristes. Mais la situation est paradoxale, dit-il : « Si c’est vraiment sécurisé, les touristes nous demandent pourquoi on doit avoir une escorte militaire. » Niamey impose, en effet, à tout Occidental se rendant dans le désert une escorte armée et payante.

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