Il y a quelques jours s’achevait la seconde édition du forum A World For Travel, dédié au tourisme durable, à Nîmes. A l’issue de ces deux jours de conférences et débats, 5 actions urgentes ont été identifiées par le cabinet Roland Berger afin de transformer le secteur sur le plan environnemental et social.
C’est sous des températures anormalement estivales que s’est achevé le forum A World For Travel il y a quelques jours à Nîmes. Dans ce contexte de réchauffement climatique, plusieurs ministres du tourisme internationaux et grandes entreprises du secteur ont échangés pendant deux jours leurs idées et leurs initiatives avec en ligne de fond une idée principale : il est urgent d’agir pour transformer le secteur sur le plan environnemental et social à échelle mondiale.
Pour sa deuxième édition, l’évènement que l’on surnomme le « Davos du tourisme » a orienté les prises de parole autour de l’action, après avoir effectué un état des lieux de la situation l’an dernier. Au terme des échanges entre participants, le cabinet Roland Berger a retenu 5 principales actions à mener pour le secteur afin d’opérer cette transformation.
Action n°1 : accélérer la collaboration entre secteurs et entre le public et le privé
Le rapport de Roland Berger souligne que la collaboration est déjà présente dans le secteur du tourisme, mais reste silotée par secteur (hôtellerie, aérien, distribution, etc.). C’est entre les différents secteurs qu’une marge d’amélioration est possible.
Cette collaboration faciliterait la création d’un fonds durable pour le tourisme, le développement d’offres multimodales, la création d’outils prenant en compte l’impact total d’un voyage et le partage de données.
Les secteurs du public et du privé doivent également joindre leurs forces pour mener à bien plusieurs projets : trouver ou créer une entité qui piloterait cette collaboration privé/public, définir des standards, normes et certifications, impulser de nouvelles initiatives durables, mener des études et créer de nouveaux lobbies pour le durable.
Action °2 : s’engager pour la réduction et la compensation carbone
La réduction et la compensation carbone doivent être facilitées par des actions menées à la fois par les gouvernements et par les entreprises du secteur.
Ce que peuvent faire les gouvernements :
- Définir des normes communes pour mesurer et déclarer les émissions de CO2 dans chaque secteur
- Définir les données à consolider pour le suivi de la décarbonation et la compensation
- Promouvoir un nombre restreint de labels pour éviter la confusion des consommateurs
- Convertir les recommandations de Net Zero en obligations légales pour les entreprises (ex : taxe carbone)
- Imposer des normes spécifiques dans la construction de nouveaux bâtiments
- Accélérer le remplacement des modes de transport très polluants (par exemple, les vols court-courriers, les bateaux de croisière fonctionnant au fioul lourd) par le biais de la réglementation
- Financer le développement de réseaux durables (par exemple installation de bornes de recharge électrique sur la route).
Ce que peuvent faire les entreprises du tourisme :
- Mettre en place de meilleurs systèmes de gestion en contrôlant l’énergie (éclairage automatique à LED, thermostat à réglage automatique, etc.), en utilisant des systèmes de gestion de l’eau (régulateurs, distributeurs à faible débit), en mesurant et en réduisant les déchets (nourriture, produits de toilette, etc.), et en réduisant les emballages
- Utiliser des énergies alternatives telles que le SAF (Sustainable Aviation Fuel) et le LNG (biométhane liquéfié).
- Améliorer leur propres infrastructures en entretenant et en optimisant la flotte, en installant une infrastructure d’énergie à terre dans tous les ports, en améliorant la performance énergétique des bâtiments
- Développer de nouvelles technologies, notamment des avions moins gourmands en énergie et la propulsion électrique et à hydrogène.
Action n°3 : augmenter l’engagement de la population pour limiter l’impact négatif individuel sur l’environnement
Selon les recherches menées par le cabinet Roland Berger, les milléniaux et la génération Z définissent la durabilité comme un critère d’achat important. Ils sont les consommateurs et voyageurs de demain. Face à eux, les organismes de réglementation et les entreprises ont un rôle essentiel à jouer pour faire évoluer leur engagement vers la limitation de l’impact environnemental.
Ce que peuvent faire les gouvernements :
- Communiquer sur l’impact carbone (en mettant en place un calculateur destiné aux touristes par exemple)
- Utiliser les réseaux sociaux pour promouvoir les bonnes pratiques et pourquoi pas établir un code de bonne conduite pour protéger la biodiversité
- Protéger les zones sensibles et limiter la capacité d’accueil des destinations à risque
- Faire la promotion de destinations moins connues afin d’éviter le surtourisme dans d’autres plus connues.
- Encourager la population à utiliser d’autres moyens de transport que l’avion (en proposant des réductions sur le train ou récompenser l’achat d’une voiture électrique)
- Mettre en place des mesures dissuasives, comme la mise en place d’une taxe qui augmenterait en fonction du nombre de vols qu’une personne effectuerait dans l’année.
Ce que peuvent faire les entreprises :
- Informer les touristes de leur empreinte carbone individuelle et les encourager à la compenser et à la réduire
- Informer les touristes des bonnes pratiques dans les lieux touristiques (éteindre les lumières, économiser l’eau, etc.)
- Offrir plus d’offres multimodales pour choisir l’option la plus écologique
- Ajuster la longueur des voyages proposés afin de limiter le surtourisme (en proposant des réductions sur des séjours plus longs) et réduire leur empreinte carbone (en proposant des menus sans viande par exemple).
Action n°4 : donner la priorité aux investissements visant à développer les voyages durables
Toutes les actions citées précédemment ne peuvent pas voir le jour sans une volonté politique forte et les investissements qui vont avec. Durant les deux jours du forum, plusieurs pistes ont été avancées pour financer le tourisme durable.
Ce que peuvent faire les gouvernements :
- Créer un budget/un fonds dédié au tourisme
- Investir dans des segments de voyages durables (lignes ferroviaires à grande vitesse, multimodalité, etc.)
- Mettre en place des mesures fiscales pour encourager la R&D (par exemple, le crédit d’impôt recherche)
- Créer de nouvelles normes comptables favorables pour les investissements ESG (par exemple, réduction de la surtaxe sur l’énergie verte)
- Investir dans la création de labels et de normes pour l’industrie du voyage afin d’obtenir une vision globale de l’innovation.
Ce que peuvent faire les entreprises :
- Investir dans les énergies bas-carbone (comme le SAF) et la rénovation des infrastructures
- Créer de nouveaux outils financiers (obligations de transition) et adapter les modèles économiques
- Faire en sorte que les processus soient certifiés par un parti tiers indépendant
- Inclure des objectifs ESG concrets et quantifiés dans le calcul des primes des décisionnaires
- Utiliser des programmes d’incitation à long terme (LTI) pour les investisseurs.
Action n°5 : améliorer l’impact social et revaloriser les ressources humaines
Dans le tourisme durable, il ne faut pas oublier le volet social. Là encore, le cabinet Roland Berger a identifié plusieurs actions pouvant être menées par les gouvernements et les entreprises.
Ce que peuvent faire les gouvernements :
- Lancer des programmes éducatifs à l’échelle du secteur (MOOC en ligne, programmes gratuits dans les écoles) etommuniquer de manière adéquate pour changer l’image des métiers du voyage (financer des conférences TED dans les universités)
- Promouvoir l’éducation des adultes (changements de carrière, rééducation axée sur les outils numériques, etc.)
- Ajuster les salaires minimums
- Subventionner les entreprises de voyage dans le besoin afin d’assurer le maintien de l’emploi et le paiement des salaires et développer un cadre réglementaire pour les nouveaux modes de travail (travail à distance, nomades numériques, etc.)
- Recruter les communautés locales (guides touristiques pour la transmission de la culture)
- Engagez les communautés locales dans le processus de planification et co-conception des objectifs de durabilité (par exemple, un comité composé de délégués sur une base volontaire).
Ce que peuvent faire les entreprises :
- Attirer les talents en proposant un meilleur salaire et en donnant une meilleure image des métiers du tourisme
- Créer un environnement de travail attractif et sain
- Créer des programmes de formation adéquats, notamment sur la durabilité.